Pendant le Ramadan, les utilisateurs des réseaux sociaux multiplient les partages de moments spirituels : photos de prières, versets coraniques, citations inspirantes. Ces partages permettent à ceux qui ne peuvent pas vivre cette période en communauté physique de se connecter virtuellement. Le sentiment d’appartenance à une communauté est renforcé par la possibilité de s’unir à travers des images et des messages positifs.

Les hashtags comme #RamadanMubarak ou #RamadanKareem circulent sur Instagram et Facebook, accompagnés de photos montrant des pratiques religieuses : des images de la prière du Taraweeh, de la lecture du Coran, ou des moments de réflexion spirituelle. Ces partages visent à inspirer, motiver et rappeler les valeurs de ce mois sacré, tout en permettant aux croyants de se sentir en communion, même à distance. Ils créent un espace de solidarité virtuelle, où chacun peut partager ses défis et ses victoires spirituelles.

Les repas du Ramadan, notamment l'iftar (rupture du jeûne) et le suhoor (repas avant l'aube), sont devenus des moments incontournables sur les réseaux sociaux. Chaque plat est une occasion de se démarquer, d’émerveiller ses abonnés avec des créations culinaires, des recettes partagées ou encore des moments de convivialité en famille. Les tables d'iftar, ornées de mets traditionnels, sont souvent photographiées et publiées en ligne, devenant des symboles de l'abondance et de la solidarité propres à cette période.

Cependant, ce partage numérique des repas du Ramadan n’est pas sans conséquence. Il peut générer une forme de compétition ou de pression sociale. Dans une époque où la perfection visuelle est recherchée, certains utilisateurs ressentent le besoin de mettre en avant des repas irréprochables et des moments familiaux parfaits, parfois au détriment de l’authenticité. Le contraste entre ce qui est montré en ligne et la réalité quotidienne peut parfois être source de mal-être pour ceux qui ne vivent pas le Ramadan de manière aussi "idyllique".

La pratique religieuse pendant le Ramadan est également affectée par cette mise en avant numérique. Si, pour certains, partager un verset coranique ou un moment de prière peut renforcer leur foi et leur connexion spirituelle, pour d'autres, cela peut devenir une forme de pression. La visibilité sur les réseaux sociaux transforme parfois la spiritualité en spectacle. Certains ressentent le besoin de "performer" leur foi, de publier des témoignages de leur dévotion, ce qui peut nuire à une expérience plus intime et authentique du Ramadan.

Cette "performance" religieuse se traduit parfois par une course à l’image parfaite : des photos de mosquées magnifiquement éclairées, des vidéos de prières filmées à la perfection, ou encore des publications de repas somptueux. Si ces partages peuvent inspirer certains, ils peuvent aussi engendrer une comparaison sociale qui éclipse le véritable sens du Ramadan.

Les marques ont, elles aussi, investi les réseaux sociaux pour promouvoir des produits et des services spécifiques au mois de Ramadan. Depuis des campagnes publicitaires mettant en avant des produits alimentaires pour l’iftar jusqu’à des promotions pour des voyages ou des vêtements traditionnels, le mois sacré devient un terrain fertile pour les stratégies commerciales. Les influenceurs et les entreprises profitent de cette période pour créer des partenariats, souvent sous forme de promotions liées à des codes de réduction pour l’iftar ou des offres spéciales pour les repas de fête.

Cependant, cette commercialisation soulève une question importante : celle de l'impact de la consommation sur la signification spirituelle du Ramadan. Alors que certains voient dans ces initiatives une manière de faciliter la vie des musulmans pendant le mois sacré, d’autres y perçoivent une dilution du sens religieux du Ramadan, réduit à un mois de consommation, de promotion et de spectacle.