La politique marocaine à l’épreuve de la nuance : un appel à dépasser le simplisme

Le Maroc a prouvé à plusieurs reprises sa capacité à relever des défis de taille grâce à une approche pragmatique et concertée.


La réforme du code de la famille doit s’inscrire dans cette dynamique. Plutôt que de céder à la tentation du simplisme ou de l’immobilisme, il est temps de s’engager dans un dialogue véritablement inclusif, où les nuances, loin d’être des obstacles, deviennent le socle d’un progrès durable.
C’est en réconciliant tradition et modernité, en écoutant toutes les voix et en refusant les solutions faciles, que le Maroc pourra avancer vers un modèle sociétal qui garantit dignité, justice et égalité pour tous ses citoyens.



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Par Adnane Benchakroun

Dans le tumulte de la scène politique marocaine, il devient de plus en plus évident que la nuance perd du terrain face à une radicalité qui s’installe insidieusement. Les débats, souvent dictés par l’urgence et l’émotion, se réduisent à des confrontations binaires, laissant peu de place à la réflexion ou à l’exploration des complexités qui définissent notre époque. Cette tendance, loin d’être propre au Maroc, prend cependant une forme inquiétante dans un pays où les défis économiques, sociaux et environnementaux nécessitent des approches visionnaires et nuancées.

La radicalisation des discours n’est pas sans lien avec l’évolution des modes de communication. Les réseaux sociaux, devenus des arènes publiques où les émotions l’emportent sur les faits, favorisent des jugements tranchés. Dans cet espace, les opinions modérées sont souvent noyées dans le bruit de slogans simplistes et populistes, qui trouvent un écho auprès d’une audience en quête de réponses rapides à des problématiques complexes.

Résultat : le compromis, pourtant essentiel à toute démocratie, est perçu comme une faiblesse, et l’action politique s’embourbe dans un cercle vicieux d’immobilisme ou de décisions précipitées.

Pourtant, le Maroc ne peut se permettre cette superficialité. Les grands chantiers nationaux – de la réforme de l’éducation à la transition énergétique, en passant par la lutte contre les inégalités sociales – exigent une vision qui dépasse l’instantanéité. Ces défis ne se résoudront ni par des discours populistes, ni par des solutions miracles, mais bien par une approche réfléchie, concertée et ancrée dans le long terme. Ignorer cette nécessité, c’est risquer de sacrifier l’avenir sur l’autel du court-termisme.

Il est impératif que les élites politiques, économiques et sociales renouent avec l’essence même du débat public : un espace où les idées, même divergentes, peuvent coexister et enrichir la réflexion collective.

Les leaders marocains, qu’ils soient au sein des institutions ou dans la société civile, ont la responsabilité de résister à la tentation du simplisme et de réhabiliter le dialogue constructif. Cela passe par une pédagogie constante pour expliquer les choix stratégiques, par une transparence accrue sur les processus décisionnels, et par la promotion d’un véritable pluralisme des idées.

Le Maroc, riche de sa diversité culturelle et de son histoire millénaire, a toujours su tirer sa force de sa capacité à conjuguer tradition et modernité. Ce même esprit de nuance doit imprégner le discours politique pour éviter que notre société ne glisse dans une polarisation stérile. Face aux défis globaux qui se présentent, seul un Maroc ancré dans la profondeur et la réflexion pourra prétendre à un développement durable et inclusif.

La nuance n’est pas un luxe, c’est une nécessité. Et c’est un appel  à tous les acteurs de la vie publique : engageons-nous dans un dialogue responsable, où la complexité du réel n’est pas un obstacle mais une richesse.


Lundi 20 Janvier 2025

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