Par Abdeslam Seddiki.
Dans notre chronique précédente, il était question de la responsabilité du gouvernement face aux attentes des citoyens. Il s’agit dans la présente chronique d’aborder l’autre facette de la problématique, celle du rôle de l’opposition et plus précisément de la gauche qui en constitue l’ossature.
Alors que la droite, sorite victorieuse des élections, s’est montrée unie et solidaire, la gauche n’a pas suffisamment émergé, pour constituer une véritable force pour devenir le fer de lance du changement.
Avec un total de 58 sièges, elle représente sur le plan numérique à peine 14,6% des voix. Ce qui est loin de refléter la présence des idées de gauche dans la société marocaine. Pour ne pas avoir réussi à transformer ce capital potentiel en capital réel, à « transformer les idées en progrès » pour reprendre une idée chère au PPS, ce sont d’autres forces qui l’ont fait à sa place en prenant à leur compte les mots d’ordre et les principes fondateurs de la gauche tels que la justice sociale et territoriale, l’égalité hommes-femmes, la lutte contre la corruption, le respect de la dignité humaine…
Une telle configuration du paysage politique est pour le moins anachronique. Elle n’est pas, n’en déplaise à ceux qui vont vite en besogne, de nature à assurer un fonctionnement sain et serein de la démocratie. Celle-ci suppose un certain équilibre entre une majorité qui gouverne et une opposition qui se positionne en alternative.
Pour paraphraser une formule célèbre, nous dirions « si l’opposition n’existait pas il faudrait l’inventer ». Fort heureusement, l’opposition, même minoritaire, existe. Elle est essentiellement représentée par la gauche, dans sa diversité. Ce qui la met face à ses responsabilités.
Les élections, si elles constituent un moment démocratique pour renouveler les institutions représentatives du pays, sont en même temps une opportunité pour les différents partis de tester leur crédibilité, le niveau d’adhésion des électeurs à leur programme et à leur projet, de relever à la fois leur force et leur faiblesse et d’en tirer toutes les conséquences pour agir dans le sens de renforcer les acquis et de remédier aux faiblesses. Cet exercice d’introspection consistant à se voir droit dans la glace s’impose à tous. Avec un esprit de critique constructive et d’autocritique courageuse et sincère.
La gauche est appelée par cet exercice à un effort collectif au niveau de la réflexion théorique et politique. Pour ce faire, elle n’a d’autre choix que de renouer avec ses intellectuels qui faisaient jadis sa force de frappe et l’alimentaient d’une façon régulière en analyses et propositions. Ces intellectuels sont aujourd’hui déboussolés et éparpillés s’estimant à tort ou à raison abandonnés par la gauche devenue plus pragmatique et préoccupée par la gestion du court terme.
Les intellectuels (organiques) ont un rôle de premier plan. C’est à eux qu’il appartient d’actualiser le « bagage »idéologique de la gauche à la lumière de l’évolution du monde, pour le rendre attractif vis-à-vis de la jeunesse qui n’a pas vécu l’ère de la guerre froide ni celle de la lutte pour l’indépendance ou même de la Marche Verte! On ne peut pas mobiliser les jeunes d’aujourd’hui avec des mots d’ordre et des méthodes surannés.
C’est bien de relever, comme l’a fait récemment le SG d’un parti de gauche, que les Etats-Unis ne sont plus un pays impérialiste, mais encore faut-il le démontrer scientifiquement et politiquement.
Bien sûr, un parti politique n’est pas un simple bureau d’études dont le rôle consisterait à produire des études et conseils sur commande. Un parti, et surtout un parti de gauche, doit être surtout un instrument orienté vers la praxis.
Par conséquent, il est grand temps pour la gauche de quitter la salle d’attente pour reconquérir sa légitimité (populaire) en s’impliquant dans le mouvement social et syndical. Il y va de la réconciliation du citoyen avec le politique que tout le monde appelle de ses vœux. Comment peut-on réconcilier le citoyen avec le politique si ce dernier reste à distance, culturellement et géographiquement parlant ?
Et pourtant, il suffit de se rapprocher des gens et d’être à leur écoute pour créer une véritable osmose entre le parti et les masses. L’expérience entreprise par le PPS lors des dernières élections consistant à s’ouvrir sur le hirak de Jerada a été concluante et constitue désormais un cas d’école.
La gauche dont il est question est plurielle et doit le rester pour longtemps, si ce n’est pour toujours. Ce qui n’exclut nullement son unité politique autour d’une plateforme élaborée de commun accord dans un climat serein de militantisme, de camaraderie où seul prévaut l’intérêt de notre peuple et l’avenir de notre pays.
Tout comportement hégémonique et égoïste doit être définitivement banni. Une telle attitude a nui énormément à la crédibilité de la gauche et à son unité autour des objectifs communs. Il a été même en partie à l’origine de multiples scissions qui ont énormément affaibli la gauche de l’intérieur. Le moment est venu de tourner cette page et de voir le monde autrement, dans une vision dialectique et une optique dynamique.
Pour cela, la gauche doit dépasser les querelles de chapelle aggravées par certains comportements d’égo. C’est aujourd’hui qu’il faut préparer l’alternative de demain. La gauche peut être unie mais dans la diversité. Toutes les sensibilités doivent être associées sans exclusive aucune. A condition de ne pas remettre en cause les principes fondateurs de la nation.
Ce travail de reconstruction/restructuration, une pérestroïka à la marocaine, doit être entamé dès la prochaine rentrée parlementaire en mettant en place, au niveau du parlement, un front d’opposition de gauche pour contrecarrer le trio libéral et conservateur.
Par la suite, il faut œuvrer ensemble à la création des forums d’échange et de débat ouverts à la société civile et aux organisations syndicales en vue d’élaborer des alternatives crédibles et de jeter les bases d’un changement démocratique.
Notre pays a besoin plus que jamais d’une gauche vivante, active et patriotique. Une gauche rénovée et « dépoussiérée » qui peut constituer une alternative démocratique à même de redonner espoir à notre jeunesse et de rehausser la place de notre pays sur l’échiquier régional et international. Elle en a les moyens à condition qu’elle tire toutes les leçons du passé et assume toutes ses responsabilités. Individuellement et collectivement.
Par Abdeslam Seddiki.
Alors que la droite, sorite victorieuse des élections, s’est montrée unie et solidaire, la gauche n’a pas suffisamment émergé, pour constituer une véritable force pour devenir le fer de lance du changement.
Avec un total de 58 sièges, elle représente sur le plan numérique à peine 14,6% des voix. Ce qui est loin de refléter la présence des idées de gauche dans la société marocaine. Pour ne pas avoir réussi à transformer ce capital potentiel en capital réel, à « transformer les idées en progrès » pour reprendre une idée chère au PPS, ce sont d’autres forces qui l’ont fait à sa place en prenant à leur compte les mots d’ordre et les principes fondateurs de la gauche tels que la justice sociale et territoriale, l’égalité hommes-femmes, la lutte contre la corruption, le respect de la dignité humaine…
Une telle configuration du paysage politique est pour le moins anachronique. Elle n’est pas, n’en déplaise à ceux qui vont vite en besogne, de nature à assurer un fonctionnement sain et serein de la démocratie. Celle-ci suppose un certain équilibre entre une majorité qui gouverne et une opposition qui se positionne en alternative.
Pour paraphraser une formule célèbre, nous dirions « si l’opposition n’existait pas il faudrait l’inventer ». Fort heureusement, l’opposition, même minoritaire, existe. Elle est essentiellement représentée par la gauche, dans sa diversité. Ce qui la met face à ses responsabilités.
Que doit-elle faire aujourd’hui ?
Comment doit-elle aborder cette nouvelle étape ?
Quelles perspectives se présentent devant-elle ?
Quelle (s) alternative(s) compte-t-elle mettre en œuvre et avec quel projet de société ?
Les élections, si elles constituent un moment démocratique pour renouveler les institutions représentatives du pays, sont en même temps une opportunité pour les différents partis de tester leur crédibilité, le niveau d’adhésion des électeurs à leur programme et à leur projet, de relever à la fois leur force et leur faiblesse et d’en tirer toutes les conséquences pour agir dans le sens de renforcer les acquis et de remédier aux faiblesses. Cet exercice d’introspection consistant à se voir droit dans la glace s’impose à tous. Avec un esprit de critique constructive et d’autocritique courageuse et sincère.
La gauche est appelée par cet exercice à un effort collectif au niveau de la réflexion théorique et politique. Pour ce faire, elle n’a d’autre choix que de renouer avec ses intellectuels qui faisaient jadis sa force de frappe et l’alimentaient d’une façon régulière en analyses et propositions. Ces intellectuels sont aujourd’hui déboussolés et éparpillés s’estimant à tort ou à raison abandonnés par la gauche devenue plus pragmatique et préoccupée par la gestion du court terme.
Les intellectuels (organiques) ont un rôle de premier plan. C’est à eux qu’il appartient d’actualiser le « bagage »idéologique de la gauche à la lumière de l’évolution du monde, pour le rendre attractif vis-à-vis de la jeunesse qui n’a pas vécu l’ère de la guerre froide ni celle de la lutte pour l’indépendance ou même de la Marche Verte! On ne peut pas mobiliser les jeunes d’aujourd’hui avec des mots d’ordre et des méthodes surannés.
C’est bien de relever, comme l’a fait récemment le SG d’un parti de gauche, que les Etats-Unis ne sont plus un pays impérialiste, mais encore faut-il le démontrer scientifiquement et politiquement.
Bien sûr, un parti politique n’est pas un simple bureau d’études dont le rôle consisterait à produire des études et conseils sur commande. Un parti, et surtout un parti de gauche, doit être surtout un instrument orienté vers la praxis.
Par conséquent, il est grand temps pour la gauche de quitter la salle d’attente pour reconquérir sa légitimité (populaire) en s’impliquant dans le mouvement social et syndical. Il y va de la réconciliation du citoyen avec le politique que tout le monde appelle de ses vœux. Comment peut-on réconcilier le citoyen avec le politique si ce dernier reste à distance, culturellement et géographiquement parlant ?
Et pourtant, il suffit de se rapprocher des gens et d’être à leur écoute pour créer une véritable osmose entre le parti et les masses. L’expérience entreprise par le PPS lors des dernières élections consistant à s’ouvrir sur le hirak de Jerada a été concluante et constitue désormais un cas d’école.
La gauche dont il est question est plurielle et doit le rester pour longtemps, si ce n’est pour toujours. Ce qui n’exclut nullement son unité politique autour d’une plateforme élaborée de commun accord dans un climat serein de militantisme, de camaraderie où seul prévaut l’intérêt de notre peuple et l’avenir de notre pays.
Tout comportement hégémonique et égoïste doit être définitivement banni. Une telle attitude a nui énormément à la crédibilité de la gauche et à son unité autour des objectifs communs. Il a été même en partie à l’origine de multiples scissions qui ont énormément affaibli la gauche de l’intérieur. Le moment est venu de tourner cette page et de voir le monde autrement, dans une vision dialectique et une optique dynamique.
Pour cela, la gauche doit dépasser les querelles de chapelle aggravées par certains comportements d’égo. C’est aujourd’hui qu’il faut préparer l’alternative de demain. La gauche peut être unie mais dans la diversité. Toutes les sensibilités doivent être associées sans exclusive aucune. A condition de ne pas remettre en cause les principes fondateurs de la nation.
Ce travail de reconstruction/restructuration, une pérestroïka à la marocaine, doit être entamé dès la prochaine rentrée parlementaire en mettant en place, au niveau du parlement, un front d’opposition de gauche pour contrecarrer le trio libéral et conservateur.
Par la suite, il faut œuvrer ensemble à la création des forums d’échange et de débat ouverts à la société civile et aux organisations syndicales en vue d’élaborer des alternatives crédibles et de jeter les bases d’un changement démocratique.
Notre pays a besoin plus que jamais d’une gauche vivante, active et patriotique. Une gauche rénovée et « dépoussiérée » qui peut constituer une alternative démocratique à même de redonner espoir à notre jeunesse et de rehausser la place de notre pays sur l’échiquier régional et international. Elle en a les moyens à condition qu’elle tire toutes les leçons du passé et assume toutes ses responsabilités. Individuellement et collectivement.
Par Abdeslam Seddiki.