Écouter le podcast en entier :
Par Aziz Boucetta
Aux Etats-Unis, le 4 juillet, l’Independance Day, est une suite de défilés grandioses, a fait l’objet de tant de films à grands budgets, et autres autosatisfactions répétées à l’infini. En France, et bien que n’y ayant pas été pour grand-chose, le pays fête bruyamment la libération de son territoire, le D Day, le fameux discours de de Gaulle sur Paris libéré, bien que par d’autres… Les Algériens en font des tonnes, de leur 5 juillet et de leur million de martyrs, chiffre extensible selon les présidents…
Et au Maroc ? Et bien au Maroc, le 18 novembre est… un jour férié, ignoré de tous quand il survient en weekend. Et pourtant… ce jour-là, le 18 novembre 1955, n’est que le troisième des trois journées de très grande intensité, le roi Mohammed V étant retourné au pays le 16 novembre après avoir été exilé par la France en Corse, puis à Madagascar, depuis 1953. Le 18 novembre commémore donc trois jours de gloire, ceux où les Marocains, tous les Marocains, ont scellé « la fin du régime de tutelle et du Protectorat et l’avènement de la liberté et de l’indépendance », comme le disait le roi ce fameux 18 novembre 1955.
Le 18 novembre, c’est surtout la prise de conscience de ce peuple de sa propre existence qui lui a permis de conquérir sa liberté ; le 18 novembre est la consécration d’une lutte qui a impliqué tous les Marocains, pour la première fois véritablement unis ; le 18 novembre est l’acte d’entrée du Maroc dans l’ère moderne (ce qu’on en a fait par la suite est une autre, et longue histoire…)…
La « tutelle » avait été entamée dès la fin du 19ème siècle par des Européens avides d’extensions territoriales, sordides dans leur manière de faire. L’Espagne qui a déjà un pied dans la région, la Grande-Bretagne en éternelle rivalité avec la France, l’Allemagne nouveau-née qui voulait s’affirmer et surtout la France présente en Algérie, en Tunisie, et dans ce qui devait devenir l’Afrique de l’Ouest francophone… tous ces aimables voisins immédiats ou proches du royaume du Maroc avec lequel leurs lointains ancêtres avaient entretenu de si fortes relations diplomatiques, militaires, navales et autres, s’apprêtaient à le dépecer.
De très longues décennies de « tutelle » française devaient commencer, avec trois grandes étapes : 1912-1956, le protectorat, une colonisation masquée, faite de pillages et de violences… 1956-années 2000, la continuation du protectorat sous la jolie formule d’Edgar Faure sur « l’indépendance dans l'interdépendance »… puis la période actuelle, depuis une dizaine d’années, où la « tutelle » est sérieusement remise en cause, au grand désarroi de Français se sentant encore chez eux du fait de la gracieuse complaisance de tant de Marocains qui n’ont pas encore vraiment assimilé le plein sens du mot « indépendance ».
C’est cette indépendance-là qu’il faut fêter le 18 novembre, l’indépendance par l’explication, par la conscientisation des gens, par leur sensibilisation que si l’Histoire passée est un patrimoine et une richesse, quoiqu’il en ait été, sa survivance et sa répétition seraient une faute…
L’indépendance, c’est quand la gloire tutoie l’Histoire, quand le colonisé s’émancipe et que le colonisateur accepte ce fait, quand le colonisé dompte son complexe du colonisé et que le colonisateur admet ses erreurs historiques et géographiques, quand les relations deviennent d’égal à égal.
C’est cette page de la colonisation (appelée protectorat) qu’il faut lire et expliquer ce jour du 18 novembre, avant de la définitivement tourner. C’est cette indépendance qu’il faut fêter ce jour-là du 18 novembre, l’indépendance des esprits !
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost