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Rédigé par Hajar DEHANE & Mamoune ACHARKI
En effet, représentant une part significative du produit intérieur brut, la commande publique ne se limite pas à un simple mécanisme d’acquisition : elle constitue un outil d’action publique structurant, au croisement des impératifs budgétaires, des ambitions économiques et des engagements sociétaux.
Toutefois, la qualité des achats publics demeure une problématique centrale, souvent tiraillée entre les exigences juridiques, les contraintes opérationnelles et les attentes croissantes en matière d'efficacité et de durabilité. Dans ce contexte, une question fondamentale s’impose : comment garantir la qualité des achats publics tout en respectant les règles de droit et en répondant aux objectifs stratégiques de l’État ?
Ainsi, la présente réflexion s’articule autour de deux axes complémentaires : l’analyse des fondements juridiques et pratiques de la qualité des achats publics, puis l’examen des leviers d’amélioration, à travers l’innovation et les achats responsables.
I. Les fondements juridiques et pratiques de la qualité des achats publics
A. Un socle juridique au service de l’équité et de l’efficience
De surcroît, la commande publique repose sur un cadre normatif exigeant, consacré par la réglementation marocaine. Trois principes fondamentaux en assurent l’ossature : la transparence, la mise en concurrence et la non-discrimination.;À cet égard, la transparence garantit l’ouverture et l’accessibilité des procédures d’achat, limitant ainsi les risques d’arbitraire et de favoritisme.
Par ailleurs, la mise en concurrence permet de sélectionner les offres les plus avantageuses selon des critères objectifs, notamment le prix, la qualité technique ou encore les performances environnementales.
Enfin, le principe de non-discrimination assure un traitement équitable des opérateurs économiques, quels que soient leur taille ou leur localisation, ouvrant ainsi les marchés publics aux petites et moyennes entreprises souvent exclues des grands appels d’offres.
Cependant, malgré la solidité de ce socle juridique, la mise en œuvre de ces principes se heurte à des difficultés pratiques : lourdeur administrative, insuffisante professionnalisation des acheteurs publics, ou encore inadéquation entre les besoins réels des bénéficiaires et les prestations livrées.
B. Des pratiques opérationnelles garantes de la performance des achats
Ainsi, au-delà du droit, la qualité des achats publics repose également sur des pratiques opérationnelles rigoureuses. Tout d’abord, la planification des besoins apparaît comme une étape cruciale. Elle permet non seulement d’identifier précisément les objectifs, mais aussi d’anticiper les risques de surcoût, de retard ou d’inadéquation des prestations.
Ensuite, le choix des procédures d’achat – appel d’offres ouvert, marché négocié, dialogue compétitif – doit être ajusté à la nature et à la complexité du projet. De plus, l’introduction de critères qualitatifs dans les appels d’offres, tels que la durabilité, la qualité technique ou l’innovation, permet de dépasser une approche strictement budgétaire.
En outre, le suivi rigoureux de l’exécution des contrats publics, à travers des mécanismes d’audit, d’évaluation ou de retour d’expérience, conditionne l’amélioration continue de la qualité des achats. À ce titre, l’institutionnalisation de bonnes pratiques constitue un levier majeur de montée en compétence au sein de l’administration.
II. Les leviers d’amélioration : innovation et responsabilité comme piliers de transformation
A. L’innovation : un moteur de qualité et d’adaptation
Dans cette optique, l’innovation représente un levier essentiel pour moderniser la commande publique. Elle permet de répondre plus efficacement aux besoins des usagers tout en intégrant des solutions à forte valeur ajoutée. À titre d’exemple, dans le domaine de la santé, les marchés publics peuvent favoriser l’acquisition de technologies médicales de pointe, contribuant ainsi à une amélioration tangible de la qualité des services rendus.
Pour ce faire, les administrations doivent faire évoluer leurs pratiques : recourir au sourcing pour identifier en amont les innovations disponibles, adapter les cahiers des charges, et introduire des critères d’évaluation valorisant les propositions novatrices. Par ailleurs, renforcer les passerelles avec les PME et startups – souvent plus agiles et créatives – permet de diversifier les solutions proposées et d’encourager un tissu économique innovant, à forte dimension locale.
B. Les achats responsables : concilier performance, durabilité et impact social
Parallèlement, les achats publics responsables traduisent une volonté croissante d’intégrer les enjeux environnementaux et sociaux dans les processus de commande publique.
En outre, cela se traduit par l’acquisition de biens et services à faible impact écologique : véhicules électriques, matériaux recyclés, normes d’efficacité énergétique, etc. Par ailleurs, les marchés publics peuvent être mobilisés pour soutenir l’insertion professionnelle, les structures d’économie sociale et solidaire, ou encore l’emploi local, à travers des dispositifs tels que les marchés réservés.
Toutefois, l’intégration de ces critères nécessite une transformation profonde de la culture administrative : formation des acheteurs, adaptation des outils juridiques, sensibilisation des opérateurs économiques. Malgré ces défis, les achats responsables apparaissent comme une opportunité stratégique pour aligner la commande publique avec les engagements du Maroc en matière de développement durable et de justice sociale.
Conclusion
En somme, la qualité des achats publics ne peut se réduire à un simple enjeu technique ou réglementaire. Elle doit s’inscrire dans une démarche globale, articulant rigueur juridique, efficacité opérationnelle et ambition stratégique.
Ainsi, la transparence, la concurrence et l’égalité de traitement constituent le socle indispensable d’une commande publique équitable. Mais encore, l’innovation et la responsabilité permettent d’ouvrir de nouvelles perspectives, en transformant les achats publics en outils de transformation économique, sociale et environnementale.
In fine, la commande publique ne doit plus être perçue comme une contrainte administrative, mais comme un instrument de gouvernance publique capable de porter les grandes transitions contemporaines. Les défis sont nombreux, certes, mais les marges de progrès, elles, sont à la hauteur des ambitions d’un État stratège, soucieux de la performance et du bien commun.