Journée mondiale de la poésie : un long poème de Hafid Fassi Fihri


Rédigé par le Dimanche 20 Mars 2022

A l'occasion de la journée mondiale de la poésie , un long poème de Hafid Fassi Fihri parle de l'errance , d'une saison de tourmente . Un cri de détresse , une bouteille jetée à la mer en cette époque de déraison collective .



Un fragment de ciel ! 

Le jour se lève , encore et toujours.
Toujours et encore .
Il n'y a plus d'amour dans ce rayon de soleil , 
Et aucune tendresse dans ce coin de terre oubliée..
La colère du Ciel va-t-elle faire de cette pierre une éternelle maudite ?

Je ne comprends pas pourquoi cet arbre n'a plus aucune religion.
Pourquoi cette plante a-t-elle perdu la foi ?
Pourquoi ce rocher ne croit plus en rien ?
Pourquoi le vent ne souffle t-il que pour égarer ?

Je ne comprends toujours pas pourquoi la beauté de ces paysages a-t-elle pu  se laisser corrompre par le vice plutôt que  de servir la vertu ?

Je n'ai toujours pas compris pourquoi les êtres de cette race qu'on dit humaine sont-ils des étrangers les uns pour les autres ?

Je ne veux pas comprendre pourquoi cette malédiction me suit partout car , aujourd'hui même si je n'ai pas envie d'avoir la prétention parfaite d'être heureux ..

J'ai surtout la nostalgie d'un lointain souvenir , doux quoique douloureux , où tout  n'était que sérénité , volupté et enchantement..

Je ne sais plus quand je pourrais me revoir dans un miroir,
Mais je sais que tous les fruits de ce pays peuvent bien être amers ,
Il suffit que ce soit la tendresse de ma mère, ou celle d'un cœur pur , 
Qui m'en offre un pour qu'il me soit délicieux..

Je me suis levé , la mort dans l'âme.
Pas envie de me laver , de me raser ..
Malgré moi , j'ai pris mon café ..
Quoique j'avais pas la patience d'aller jusqu'au bout..

Et puis quelle différence..!?
Je me fatigue dans ce silence.
Mon esprit est en panne .
Mon âme se fanne.   
Je n'ai pas oublié la fatalité, les illusions
Perdues et étouffées sur le boulevard de la débauche.
Il ne me reste plus que la désobéissance,
Car mon coeur crie famine et ma tête fait grève.
Mon seul et unique farouche désir est celui de pouvoir échapper au conformisme.
Je me suis égaré de mon chemin avant de sombrer telle une épave.

Mais qui est ce donc cette maîtresse angoissante ?
Qui d'entre ses draps se dégage une odeur empoisonnante.
C'est ma solitude et son cortège de mystères que ne saurait éloigner la plus pieuse des prières.
Tel un chasseur de gibier assoiffé ,
Elle sème des pièges sur son passage !
Faibles et incrédules viennent l'étoffer ,
Comme vaincus et saoules par un drôle de breuvage .
Reine absolue, infâme stratège.
Elle règne sans scrupules sur son manège
Muette , invisible, elle sourit 
Car des voix des autres , elle se nourrit ..
Irréelle, silencieuse , mais présente
De tuer leurs présences elle se vante..
Loin des lumières et des chaleurs , elle 
Cache avec soin sa pâleur  .
Au prix d'une fatigante labeur sachant que rien ne saurait maquiller sa laideur.

Elle sait que l'homme est une bête,
Alors elle arrive escortée de loups 
D'un pas silencieux, sa cape noire jusqu'au cou !
Sa chevelure infinie et ses yeux brillants tels des bijoux.
Sur mon corps , que possèdent ses démons elle habite ..
Déshabillée, sans honte , elle a trouvé son gîte.
A l'horizon, une bande d' acolytes admirent le spectacle d'un œil hypocrite. 

Un baiser sur mon corps, à l'aube , heure de la fuite.
Ô maîtresse, laissez-moi un peu de votre feuillage 
Pour vous coulent les larmes d'un cœur qui n'a plus aucun âge .
A votre souvenir, je m'accroche comme les oiseaux aux branchages.
Bientôt , le vent soufflant emportera tout sur son passage .
Je jouis du souvenir de sa silhouette.
Une ombre muette , un fantôme singulier.
Image d'un monde mort et d'une soirée ensoleillée.
Un rayon apparût, timide mais volontaire.
Faisant le beau , éclaireur téméraire.., d'autres l'imitèrent , histoire de plaire .
Bientôt , l'obscurité noyée d'or et de lumière.
Une vague de chaleur et de rires plongea la planète dans un état de délire..
Sur les arbres, les fruits honteux rougirent ..
L'oiseau chanta une mélodie puis songea à mourir !
Mais , à quoi bon souffrir ? 
Quand 
Lorsque jouir du spectacle sans désobéir est un jeu , un besoin, un plaisir ..

Je me suis égaré de mon chemin avant de sombrer dans la bêtise .
Partout en ce bas -monde la nature est exquise..
Pourtant , tout a été prévu : cette terre est compromise.
Quel que part dans la cité perdue ,
Par un matin d'hiver , des hommes sont passés..
Constatant le désordre, la nature se tût ..
Ultime révolte devant un empire déchu et cassé .
A quoi bon ? Cette tribu est inhospitalière..
Mensonges . Hypocrisie . Impudeur .
Parler de bonheur est indécent.
Cette cité est corrompue ..
Cet univers glacial et sans sentiments..
Cette tristesse immense comme l'espace.

La rivière dans sa belle robe de mariée.
Délaissant son lit , son fiancé et ses oreillers..
Se révolta contre la nature , fin d'une époque mouillée.
Elle s'enfuit à l'insu du temps et des saisons qui l 'ennuyaient .
Elle se noya trahie par un faux et trompeur coucher du soleil.
Quelque fois dans le ciel en colère ,
Une bande d'oiseaux fuyant le déshonneur.
Perdu l'abri de naguère ..
Partir , oublier . Cette tribu est souillée ,le temps est menteur .

Je voudrais juste être un arbre .
Boire l'eau des orages ,
Me nourrir de la terre 
Être l'ami des oiseaux .
Et puis ,  avoir la tête si haut dans les nuages .
Qu'aucun homme ne puisse y planter un drapeau..
Mon Dieu ,s'il vous plaît , quand je serais mort 
J'aimerais pouvoir rêver.

 

Un poème extrait du roman de Hafid Fassi Fihri " Une saison de tourmente " .




Hafid Fassi Fihri est un journaliste atypique , un personnage hors-normes . Ce qu'il affectionne, le… En savoir plus sur cet auteur
Dimanche 20 Mars 2022
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