Par Ali Bouallou
Par cette indifférence volontaire ou involontaire, la commission du NMD a donné le ton : l’IA ne sera pas la priorité du Maroc d’ici 2035.
Il est bien de rappeler que le Maroc a raté le virage des technologies de l’information et de l’économie du savoir dans les années 1980 et 1990 à cause de déséquilibres structurels. Notre pays avait été obligé, dès 1983, de se conformer aux exigences des institutions de Bretton Woods pour mettre à niveau ses politiques financière et monétaire, moderniser son administration publique et améliorer les indicateurs sociaux, plutôt que de laisser libre cours à la création technologique dans le cadre d’une intelligence collective, pour reprendre un terme utilisé plus d’une fois dans le rapport général du NMD.
Je fais partie de ceux qui pensent encore de nos jours que rien n’interdisait le Maroc de se lancer dans la création technologique dès le milieu des années 80. D’ailleurs, il est réjouissant de rappeler que de petites sociétés marocaines fabriquaient au milieu des années 80 des ordinateurs marocains, des cartes électroniques marocaines ainsi que des logiciels marocains. Ces entreprises ont vite déchanté faute de soutiens moral et financier.
Dans les années 1990, les opérateurs historiques de télécommunications ont joué le rôle de fer de lance de l’économie du savoir dans tous les pays développés et émergents. Dans ces pays, ces opérateurs ont investi dans des dizaines de Très Petites Entreprises (on ne les appelait pas encore startups) pour dynamiser le secteur des technologies de l’information.
La mondialisation et la libération des marchés avaient pris le dessus au bout d’un moment mais l’écosystème technologique et innovant était déjà mis en place. Les pays développés et émergents ont ainsi gardé leur avance économique grâce au progrès technologique.
Au Maroc, ce ne fût malheureusement pas le cas. L’opérateur historique de télécommunications a investi dans les années 90 dans une et une seule filiale sans grande valeur ajoutée en matière de création technologique.
A partir du milieu des années 90, le Maroc pouvait se targuer d’avoir les trois meilleures entreprises au monde de services monétiques (terminaux de paiement, gestion front-office et back-office de guichets bancaires). Ces logiciels marocains étaient/sont vendus encore de nos jours dans les quatre coins du monde. Ces fleurons de la technologie marocaine auraient pu jouer le rôle de locomotive pour d’autres entreprises technologiques dans les années 90. Elles ont eu droit à l’intérêt des pouvoirs public et financier relativement tardivement à mon sens.
Il fallait donc y croire dès les années 80 pour développer un écosystème autour de l’économie du savoir comme l’ont fait des pays qui avaient exactement les mêmes difficultés et défis que le Maroc notamment la Corée du Sud, l’Inde, la Malaisie ou l’Indonésie pour ne citer que ceux-là.
La conséquence de ce retard enregistré dans les années 80 et 90 était que les technologies de l’information n’étaient pas parmi les Métiers Mondiaux du Maroc adoptés par le Plan Emergence dans les années 2000. L’Offshoring comportait principalement les services aux clients (Call Centers) et la Tierce Maintenance Applicative (TMA). Deux volets sans grande valeur ajoutée technologique et innovatrice pour le Maroc.
Le monde connait une transformation digitale sans précédent depuis l’avènement de l’Internet et des services associés. Cette transmutation sociétale s’est accentuée avec l’avènement de l’Intelligence Artificielle (IA). Les pays développés et émergents s’y attèlent. Ils dépensent sans compter en recherche et développement en IA pour maintenir leur progrès technologique et accompagner leur développement économique. C’est une suite logique de l’amorçage de l’économie du savoir entamé dès les années 80 et 90 sans aucune appréhension des conséquences sur l’économie et le chômage où de ce que Joseph Schumpter (économiste autrichien 1883-1950) appelle la « destruction créatrice ».
En effet, pour Schumpter les nouveaux métiers d’une nouvelle économie se créent à côté des anciens métiers et non en remplacement de ces derniers. L’apport de ces nouveaux métiers est mal compris au départ mais ce n’est qu’après quelques temps que leur domaine d’application devient bénéfique. Ils peuvent également générer des innovations secondaires. C’est dire que la création l’emporte toujours sur la destruction. L’innovation entraine l’apparition de nouveaux métiers, certains disparaissent mais la progression de l’employabilité n’est nullement remise en cause.
Deux chercheurs d’Oxford (Carl Benedikt Frey & Michael A. Osborne) ont établi dans une étude, parue en 2013, que 47% des emplois aux États-Unis seront automatisés en 2034. Certains métiers physiques et administratifs, destinés aux ouvriers et classes moyennes, seront robotisés complètement ou en partie grâce à l’IA et au Big Data. Soit dit en passant, il serait intéressant de mener une étude similaire au Maroc.
Est-ce de cela dont a eu peur la commission du NMD, le volet destructeur de la destruction créatrice ? Car il est impensable que la quintessence de l’intelligencia marocaine qui compose la commission du NMD passe à côté de l’IA et de ses bienfaits sur la société et l’économie.
Ou est-ce un constat d’échec et d’impuissance pour signifier que le Maroc ne sera jamais un pays high-tech ? Et que si le Maroc ne l’a pas été dans les années 80 et 90, il ne peut le devenir d’ici 2035 !!
En tout état de cause, l’omission volontaire ou involontaire d’un chapitre détaillé sur l’apport de l’IA dans la transformation digitale ou numérique préconisant la création, pourquoi pas, d’une « Académie Royale d’Intelligence Artificielle » et l’instauration d’« Assises de l’Intelligence Artificielle » périodiques et internationales, interpelle ma génération et davantage les générations suivantes qui sont nées avec un écran tactile à la main et qui auront appris à coder en langage Python, ou autre, dès le collège voire le primaire.
Malgré toutes les réticences rationnelles et émotionnelles, il serait presque criminel de ne pas suivre les « Folies du monde » autour de l’Intelligence Artificielle, le Big Data, l’Internet Of Things… Il y va de notre souveraineté économique, et donc politique, pour les 50 à 100 années à venir.
Ali Bouallou
Il est bien de rappeler que le Maroc a raté le virage des technologies de l’information et de l’économie du savoir dans les années 1980 et 1990 à cause de déséquilibres structurels. Notre pays avait été obligé, dès 1983, de se conformer aux exigences des institutions de Bretton Woods pour mettre à niveau ses politiques financière et monétaire, moderniser son administration publique et améliorer les indicateurs sociaux, plutôt que de laisser libre cours à la création technologique dans le cadre d’une intelligence collective, pour reprendre un terme utilisé plus d’une fois dans le rapport général du NMD.
Je fais partie de ceux qui pensent encore de nos jours que rien n’interdisait le Maroc de se lancer dans la création technologique dès le milieu des années 80. D’ailleurs, il est réjouissant de rappeler que de petites sociétés marocaines fabriquaient au milieu des années 80 des ordinateurs marocains, des cartes électroniques marocaines ainsi que des logiciels marocains. Ces entreprises ont vite déchanté faute de soutiens moral et financier.
Dans les années 1990, les opérateurs historiques de télécommunications ont joué le rôle de fer de lance de l’économie du savoir dans tous les pays développés et émergents. Dans ces pays, ces opérateurs ont investi dans des dizaines de Très Petites Entreprises (on ne les appelait pas encore startups) pour dynamiser le secteur des technologies de l’information.
La mondialisation et la libération des marchés avaient pris le dessus au bout d’un moment mais l’écosystème technologique et innovant était déjà mis en place. Les pays développés et émergents ont ainsi gardé leur avance économique grâce au progrès technologique.
Au Maroc, ce ne fût malheureusement pas le cas. L’opérateur historique de télécommunications a investi dans les années 90 dans une et une seule filiale sans grande valeur ajoutée en matière de création technologique.
A partir du milieu des années 90, le Maroc pouvait se targuer d’avoir les trois meilleures entreprises au monde de services monétiques (terminaux de paiement, gestion front-office et back-office de guichets bancaires). Ces logiciels marocains étaient/sont vendus encore de nos jours dans les quatre coins du monde. Ces fleurons de la technologie marocaine auraient pu jouer le rôle de locomotive pour d’autres entreprises technologiques dans les années 90. Elles ont eu droit à l’intérêt des pouvoirs public et financier relativement tardivement à mon sens.
Il fallait donc y croire dès les années 80 pour développer un écosystème autour de l’économie du savoir comme l’ont fait des pays qui avaient exactement les mêmes difficultés et défis que le Maroc notamment la Corée du Sud, l’Inde, la Malaisie ou l’Indonésie pour ne citer que ceux-là.
La conséquence de ce retard enregistré dans les années 80 et 90 était que les technologies de l’information n’étaient pas parmi les Métiers Mondiaux du Maroc adoptés par le Plan Emergence dans les années 2000. L’Offshoring comportait principalement les services aux clients (Call Centers) et la Tierce Maintenance Applicative (TMA). Deux volets sans grande valeur ajoutée technologique et innovatrice pour le Maroc.
Le monde connait une transformation digitale sans précédent depuis l’avènement de l’Internet et des services associés. Cette transmutation sociétale s’est accentuée avec l’avènement de l’Intelligence Artificielle (IA). Les pays développés et émergents s’y attèlent. Ils dépensent sans compter en recherche et développement en IA pour maintenir leur progrès technologique et accompagner leur développement économique. C’est une suite logique de l’amorçage de l’économie du savoir entamé dès les années 80 et 90 sans aucune appréhension des conséquences sur l’économie et le chômage où de ce que Joseph Schumpter (économiste autrichien 1883-1950) appelle la « destruction créatrice ».
En effet, pour Schumpter les nouveaux métiers d’une nouvelle économie se créent à côté des anciens métiers et non en remplacement de ces derniers. L’apport de ces nouveaux métiers est mal compris au départ mais ce n’est qu’après quelques temps que leur domaine d’application devient bénéfique. Ils peuvent également générer des innovations secondaires. C’est dire que la création l’emporte toujours sur la destruction. L’innovation entraine l’apparition de nouveaux métiers, certains disparaissent mais la progression de l’employabilité n’est nullement remise en cause.
Deux chercheurs d’Oxford (Carl Benedikt Frey & Michael A. Osborne) ont établi dans une étude, parue en 2013, que 47% des emplois aux États-Unis seront automatisés en 2034. Certains métiers physiques et administratifs, destinés aux ouvriers et classes moyennes, seront robotisés complètement ou en partie grâce à l’IA et au Big Data. Soit dit en passant, il serait intéressant de mener une étude similaire au Maroc.
Est-ce de cela dont a eu peur la commission du NMD, le volet destructeur de la destruction créatrice ? Car il est impensable que la quintessence de l’intelligencia marocaine qui compose la commission du NMD passe à côté de l’IA et de ses bienfaits sur la société et l’économie.
Ou est-ce un constat d’échec et d’impuissance pour signifier que le Maroc ne sera jamais un pays high-tech ? Et que si le Maroc ne l’a pas été dans les années 80 et 90, il ne peut le devenir d’ici 2035 !!
En tout état de cause, l’omission volontaire ou involontaire d’un chapitre détaillé sur l’apport de l’IA dans la transformation digitale ou numérique préconisant la création, pourquoi pas, d’une « Académie Royale d’Intelligence Artificielle » et l’instauration d’« Assises de l’Intelligence Artificielle » périodiques et internationales, interpelle ma génération et davantage les générations suivantes qui sont nées avec un écran tactile à la main et qui auront appris à coder en langage Python, ou autre, dès le collège voire le primaire.
Malgré toutes les réticences rationnelles et émotionnelles, il serait presque criminel de ne pas suivre les « Folies du monde » autour de l’Intelligence Artificielle, le Big Data, l’Internet Of Things… Il y va de notre souveraineté économique, et donc politique, pour les 50 à 100 années à venir.
Ali Bouallou
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Pensez-vous que le NMD devait consacrer un volet spécifique au développement l’Intelligence Artificielle au Maroc d’ici 2035 ?