La main invisible a ses limites. Ce principe régulateur des marchés a montré ses tares, du moins au Maroc.
Preuve en est que notre pays a dû mettre un frein à l’hégémonie économique turque. Si la donne a changé, c’est qu’il était grand temps !
La révision de l’accord du libre-échange, qui nous lie au pays d’Erdogan devenait on ne peut plus inévitable. 1200 produits sont à présent soumis aux droits tarifaires. Une barrière douanière qui s’impose d’elle-même pour préserver le tissu économique marocain.
Mal en point, Le secteur du textile est sur une pente glissante. Cela fait une décennie que ce dernier encaisse des pertes exponentielles . Le prix accolé aux produits importés du pays d’Erdogan serait imbattable. Celui-ci aurait engrangé, et à lui seul, la majeure partie du marché marocain. Et cela pour trois raisons précise
D’abord, la Turquie est l’enfante d’une politique d’export. En clair, celle-ci aurait misé sur la dévaluation de sa monnaie nationale. Une dévaluation qui aurait entamé trois à quatre fois la valeur de ce qu’était la lire turque.
Ce qui peut, en passant, éclairer certains curieux sur le succès olympique du marché chinois . Bien qu’étant un pays solide économiquement, ce qui devrait fortifier sa devise, le gouvernement, et pour forcer sa compétitivité jugée « inégalable » sur le marché international, a dû, et pour cet unique fait, maintenir à la baisse le Yuan.
Revenons en Turquie et rajoutons une couche. Ces produits turcs destinés à l’export sont subventionnés par l’État. chose qui fait baisser drastiquement leurs couts de production. La Turquie est aussi réputée pour la pratique dite du « Dumping ». Une pratique qui consiste à écouler son produit local moins cher, mais ailleurs.
À la lumière de ces trois facteurs, sans doute serait-il à propos d’aligner quatre questions imparables :
Comment le Maroc aurait-t-il pu tenir tête à une politique économique aussi bien ficelée ?
Pourquoi le Maroc n’a-t-il pas rectifié le tir tout le long des années écoulées ?
Pourquoi maintenant ?
Enfin, cette mesure serait-elle une solution durable ?
Nous n’étions pas prêts
À délier les langues des gens du terrain, et pour cerner de près les difficultés voisines, il advint, dans leurs bouches, que le Maroc serait parti du mauvais pied. Que l’accord du libre-échange, aussi prometteur soit-il, fut pris à la va vite. Qu’il fallut, eu égard de la lourdeur de la décision, d’abord prendre la température des professionnels.
Cela s’entend, car pour instaurer une concurrence dite loyale, cette fameuse compétitivité qu’on crie sur les toits , et qui serait cette panacée à même de combler et le consommateur et l’entrepreneur, n’est-ce pas le but ultime du libre-échange ?
Pour que ce miracle soit donc opérationnel, il fallut d’abord s’assurer de la solidité du secteur, et ceci au niveau local.
Comment peut-on rompre le cou à une hégémonie économique, favoriser une résilience du produit local, sans que l’on soit outillé ?
Ne fallut-il pas, en usant de notre tant-soi-peu de discernement, prédisposer de barrières d’entrées aux produits importés, présumer de leur éventuelle mainmise sur notre marché à nous ?
Nombre d’entrepreneurs locaux relèvent les manquements du gouvernement à leurs égards.
Des manquements traduits par des mesures qui ne cadrent que moyennement avec leurs souhaits. De ces mesures, qui, seraient-elles de bonne foi, qu’elles demeurent inappropriées. Car, et pour parer à un éventuel écrasement de par le marché international, et en sus d'une régulation douanière, sans doute faudrait-il disposer de fonds plus importants, débloqués dans des délais qui se respectent.
Le temps de se rattraper
Pour finir sur une note pratique, il serait nécessaire, après avoir mis en perspective l’avers de la médaille, d’en considérer le revers.
S’il est vrai que stopper cette hémorragie du textile marocain par des mesures coercitives est appréciable, cela ne devrait aucunement encourager nos locaux à dormir sur leurs lauriers, en prétextant que la menace est levée. Ou d’écouler des produits de qualité laissant à désirer pour nos compatriotes.
Ceci, en professant la pratique de l’ancienne école, celle qui stipule que tant qu’un produit est disponible en quantité suffisante, celui-ci se vendra sans difficulté.
Nos locaux devraient développer leur rapport qualité/prix, œuvrer dans la possibilité que les sanctions sur les produits turcs puissent, à tout moment, être levées, et que partant de là, nos locaux se devront être compétitifs.
Hicham Aboumerrouane