Par Aziz Boucetta
En ce jeudi chaud 9 septembre, le Maroc se relève de ses fameuses élections, enfin derrière lui. Bien évidemment historiques, comme toutes celles qui ont précédé, ces élections auront au moins été singulières : trois scrutins en un, mercredi comme jour de vote, et un mode de comptage étrange. Résultat ? Une abstention imposante et une classe politique toujours aussi impotente. Mais qui serait le futur chef du gouvernement ?
Point positif de toute l’opération, et même si la confiance n’est pas complétement rétablie, voire même instaurée dans les chaumières à l’égard des politiques, les pouvoirs d’achat ont été améliorés par cet extraordinaire transfert financier auxquels nous avons assisté. C’est qu’une campagne électorale coûte cher en nos semi-arides contrées… Outre « les frais » d’investiture, pour obtenir l’accréditation partisane, la campagne en elle-même est un calvaire financier, un gouffre, pour les candidats, surtout ceux qui ont le billet facile. Au final, et comme pour aïd al-adha et ses transferts d’argent de la campagne vers la ville, la campagne électorale est une massive bascule de pouvoir d’achat entre catégories sociales.
Venons-en aux résultats de la Chambre des représentants… et sans entrer dans les détails, trois partis se sont hissés en tête en nombre de sièges et leurs légitimes prétendants assiègent la chefferie du gouvernement. Nizar Baraka rêve d’y camper pour les cinq prochaines années, Saadeddine Elotmani aimerait bien y rester, et Aziz Akhannouch voudrait y croire, ah que oui.
Tel est le mérite de ce nouveau quotient électoral que le Maroc institutionnel a inventé et qui tient en compte le nombre des inscrits plutôt que, comme cela est la coutume universelle, le nombre de votants. Ma3linach… RNI, Istiqlal et PJD sont dans le triangle de tête, entre 65 et 85 sièges chacun, et le PAM un peu derrière, dont la performance est estimée à une cinquantaine d’élus.
Avant le pronostic, donc, une précision… Lors de l’opération de vote, les gens élisent leurs champions sur plusieurs critères : Le feeling, le programme, l’amitié, la proximité, ou l’argent… on peut ajouter, parfois, rarement, le programme. Une fois l’élection passée, le chef de l’Etat doit choisir son chef du gouvernement au sein du parti arrivé premier, aux termes de l’article 47, le fameux, le tant discuté article 47. Mais les critères du chef de l’Etat ne sont pas ceux de la population, car un chef du gouvernement doit être compétent, par la science, l’instruction, la connaissance et la pratique, pour affronter les multiples défis internes et désormais externes qui se posent au royaume… en plus d’être ouvert sur l’étranger, maîtrisant au moins deux langues, si ce n’est trois ou quatre… populaire pour pouvoir s’adresser à la population sans se faire insulter ou boycotter… accessible, pour rapprocher le populaire du politique… représentant un parti qui, à la tête de la majorité et du gouvernement, ne réduirait pas la scène politique à une caricature… et surtout, avant tout et par-dessus tout, présentant un profil blanc comme neige, plus blanc que blanc. Cela réduit la concurrence !...
Et voilà que, donc, le sort du pays est entre les mains de deux personnes, celles qui ne seraient pas choisies pour cheffer le gouvernement mais qui devront lui offrir une majorité. De trois partis politiques, alors, sortira un chef du gouvernement, et comme la constitution n’impose pas au roi de choisir le chef du parti arrivé premier, chaque formation devra pouvoir offrir deux, trois, quatre profils… Laissons le lecteur imaginer combien de champions le RNI ou l’Istiqlal ou le PJD pourront-ils proposer, répondant aux critères énumérés au paragraphe précédent… Même magnanime et indulgent, ce lecteur ne devrait pas trouver plus d’une, maximum deux personnes par parti politique possiblement gagnant.
L’exercice prospectiviste se complique alors singulièrement… Restons donc sur les chefs de ces partis, et le futur chef du gouvernement pourrait être Saadedine Elotmani ou Aziz Akhannouch ou Nizar Baraka. Le premier, homme politique incontesté et chef politique attesté, s’est révélé chef du gouvernement technocrate, conciliant à l’extrême mais manquant de mordant. Si c’est Aziz Akhannouch, bien qu’ « entrepreneurialement » compétent, il n’est pas certain qu’il réponde aux critères plus haut. Quant à Nizar Baraka, il est jusque-là considéré comme favori, aux termes du scoring proposé, à la condition qu’il s’ouvre sur la société pour le choix des ministres, s’il est choisi, son parti comptant un nombre considérable de profils douteux.
Il serait intéressant de regarder ce que disent les gens sur cet extraordinaire outil démocratique que sont les réseaux… MM. Elotmani, Akhannouch ou Baraka ?
Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com