A lire ou à écouter en podcast :
Par Mustapha Sehimi
Voici quelques semaines, le chef de l'exécutif, Aziz Akhannouch, paraissait bien droit dans ses bottes, si l'on ose dire. Il avait adressé aux ministres une lettre de cadrage, début août, pour les inviter de prendre en compte la feuille de route et les axes devant prévaloir dans leurs prévisions pour 2024.
Des réunions de "réglage" se sont alors engagées avec la direction du budget, maître-d'œuvre en la matière. La préparation du projet de PLF a alors avancé et il ne restait plus pratiquement que d'ultimes arbitrages à faire par le Chef du gouvernement avant l'adoption puis la soumission des "orientations générales" du projet de loi au Conseil des ministres présidé par SM le Roi (art.49 de la Constitution). C'était là l’agenda initial donc, avec le dépôt du PLF devant le Parlement, avant le 20 octobre.
Un certain monde rural marginalisé
Et puis le séisme d'Al Haouz en date du 8 septembre vient bousculer, fracasser même cet agenda. Une catastrophe nationale à tous égards; il faut faire face, secourir, aider les 300.000 sinistrés, les reloger et veiller à définir et à mettre en œuvre un programme stratégique de reconstruction et de développement. C'est le Souverain qui prend en main ce nouveau chantier avec plusieurs réunions finalisées par des orientations et une nouvelle problématique d'un développement territorial durable dans la région d'Al Haouz et un périmètre élargi à six provinces et préfectures.
Fragilisé, le cabinet l'est fortement. A plusieurs titres d'ailleurs. N'est-ce pas avec cette catastrophe naturelle l'échec d'une politique dans un certain monde rural, en particulier celui des zones montagneuses ? Le Plan Maroc Vert (PMV) d'une dizaine d'années (2008-2020) n'a-t-il pas oublié ce monde- là par rapport au secteur agricole moderne et à des territoires mieux lotis ? Le Souverain décide l'allocation d'une enveloppe de 120 MMDH sur cinq ans pour le financement de ce grand programme de reconstruction.
Problème : avec quel financement ? Un compte spécial "126" est ouvert au trésor et à Bank Al-Maghrib. I1 y a quelques jours, le wali de la banque centrale, Abdellatif Jouahri, a annoncé qu'il avait atteint 10 MMDH. Mais pour le reste qu'en est-il ? Une aide budgétaire est nécessaire : de quel montant ? Et elle sera de toute façon inscrite dans le PLP 2024, réduisant d'autant les ressources disponibles et mobilisables dans les investissements publics prévus, de l'ordre de 300 MMDH pour 2024.
Une contraction significative au titre de ce chapitre est inévitable et nul doute qu'elle se prolongera en 2024 et même au-delà. Quels projets, program-dira-t-on, mais ailleurs ? Peut-on escompter sur un rebond des investissements directs étrangers (IDE) ? Dans la présente conjoncture, tel n'est pas le cas au vu des chiffres des sept premiers mois de 2023 avec seulement 8,63 MMDH, soit une forte baisse de 52%. Après un médiocre taux de croissance en 2022 (1,3 %) et un redressement prévisionnel de 2,9% en 2023 puis 3,2% en 2024, les calculs sont désormais à revoir pour l'année en cours et celle qui suit.
Il faudra en effet tenir compte de l'impact du séisme, les conjoncturistes retenant au moins une baisse d'un point de croissance. De plus, les prévisions actuelles retiennent des chiffres seulement indicatifs de 6% d'inflation, d'une campagne céréalière de 70 max et d'un baril de pétrole Brent autour de 82-83 dollars. Des données pas vraiment maîtrisables d'autant plus que la conjoncture économique mondiale reste préoccupante (0,9% de croissance des États-Unis en 2024 et ce même taux pour la zone euro).
Des réunions de "réglage" se sont alors engagées avec la direction du budget, maître-d'œuvre en la matière. La préparation du projet de PLF a alors avancé et il ne restait plus pratiquement que d'ultimes arbitrages à faire par le Chef du gouvernement avant l'adoption puis la soumission des "orientations générales" du projet de loi au Conseil des ministres présidé par SM le Roi (art.49 de la Constitution). C'était là l’agenda initial donc, avec le dépôt du PLF devant le Parlement, avant le 20 octobre.
Un certain monde rural marginalisé
Et puis le séisme d'Al Haouz en date du 8 septembre vient bousculer, fracasser même cet agenda. Une catastrophe nationale à tous égards; il faut faire face, secourir, aider les 300.000 sinistrés, les reloger et veiller à définir et à mettre en œuvre un programme stratégique de reconstruction et de développement. C'est le Souverain qui prend en main ce nouveau chantier avec plusieurs réunions finalisées par des orientations et une nouvelle problématique d'un développement territorial durable dans la région d'Al Haouz et un périmètre élargi à six provinces et préfectures.
Fragilisé, le cabinet l'est fortement. A plusieurs titres d'ailleurs. N'est-ce pas avec cette catastrophe naturelle l'échec d'une politique dans un certain monde rural, en particulier celui des zones montagneuses ? Le Plan Maroc Vert (PMV) d'une dizaine d'années (2008-2020) n'a-t-il pas oublié ce monde- là par rapport au secteur agricole moderne et à des territoires mieux lotis ? Le Souverain décide l'allocation d'une enveloppe de 120 MMDH sur cinq ans pour le financement de ce grand programme de reconstruction.
Problème : avec quel financement ? Un compte spécial "126" est ouvert au trésor et à Bank Al-Maghrib. I1 y a quelques jours, le wali de la banque centrale, Abdellatif Jouahri, a annoncé qu'il avait atteint 10 MMDH. Mais pour le reste qu'en est-il ? Une aide budgétaire est nécessaire : de quel montant ? Et elle sera de toute façon inscrite dans le PLP 2024, réduisant d'autant les ressources disponibles et mobilisables dans les investissements publics prévus, de l'ordre de 300 MMDH pour 2024.
Une contraction significative au titre de ce chapitre est inévitable et nul doute qu'elle se prolongera en 2024 et même au-delà. Quels projets, program-dira-t-on, mais ailleurs ? Peut-on escompter sur un rebond des investissements directs étrangers (IDE) ? Dans la présente conjoncture, tel n'est pas le cas au vu des chiffres des sept premiers mois de 2023 avec seulement 8,63 MMDH, soit une forte baisse de 52%. Après un médiocre taux de croissance en 2022 (1,3 %) et un redressement prévisionnel de 2,9% en 2023 puis 3,2% en 2024, les calculs sont désormais à revoir pour l'année en cours et celle qui suit.
Il faudra en effet tenir compte de l'impact du séisme, les conjoncturistes retenant au moins une baisse d'un point de croissance. De plus, les prévisions actuelles retiennent des chiffres seulement indicatifs de 6% d'inflation, d'une campagne céréalière de 70 max et d'un baril de pétrole Brent autour de 82-83 dollars. Des données pas vraiment maîtrisables d'autant plus que la conjoncture économique mondiale reste préoccupante (0,9% de croissance des États-Unis en 2024 et ce même taux pour la zone euro).
Mode action
L'endettement et des emprunts s'imposent à l'évidence. Déjà avant le séisme, le recours à des ressources financières externes a été utilisé, situant le ratio de la dette extérieure à 18,6 % en 2023 au lieu de 16% entre 2019 et 2022. La dette globale du PIB du trésor allait ainsi se situer à hauteur de 72 %, la dette intérieure étant, elle, de 54 %.
La dette publique globale, selon le HCP, serait de 86%, pratiquement comme en 2022. Autant de ratios sans doute à revoir avec cette interrogation : jusqu'où peut aller le curseur de la soutenabilité des finances publiques avec de telles contraintes ?
L'impact financier et économique du séisme est important. Pour autant, le gouvernement devra se mettre en "mode action", se garder d'un "mode veille" et s’atteler à d'autres réformes à engager et à poursuivre: agenda de la protection sociale en 2024 et au-delà, refonte profonde de la fiscalité sans cesse reportée, réformes sociétales, Code la famille, Code du travail) et sociales aussi (pouvoir d'achat des citoyens), promotion de l'emploi et de l'investissement,... Un grand challenge. Ce cabinet aura-t-il la capacité réformatrice requise ? A mi-mandat, il lui appartient d'en faire la preuve
Rédigé par Mustapha Sehimi sur Quid -
L'endettement et des emprunts s'imposent à l'évidence. Déjà avant le séisme, le recours à des ressources financières externes a été utilisé, situant le ratio de la dette extérieure à 18,6 % en 2023 au lieu de 16% entre 2019 et 2022. La dette globale du PIB du trésor allait ainsi se situer à hauteur de 72 %, la dette intérieure étant, elle, de 54 %.
La dette publique globale, selon le HCP, serait de 86%, pratiquement comme en 2022. Autant de ratios sans doute à revoir avec cette interrogation : jusqu'où peut aller le curseur de la soutenabilité des finances publiques avec de telles contraintes ?
L'impact financier et économique du séisme est important. Pour autant, le gouvernement devra se mettre en "mode action", se garder d'un "mode veille" et s’atteler à d'autres réformes à engager et à poursuivre: agenda de la protection sociale en 2024 et au-delà, refonte profonde de la fiscalité sans cesse reportée, réformes sociétales, Code la famille, Code du travail) et sociales aussi (pouvoir d'achat des citoyens), promotion de l'emploi et de l'investissement,... Un grand challenge. Ce cabinet aura-t-il la capacité réformatrice requise ? A mi-mandat, il lui appartient d'en faire la preuve
Rédigé par Mustapha Sehimi sur Quid -