Fnideq : quand la frustration des jeunes déborde aux frontières, amplifiée par les réseaux sociaux


Rédigé par le Mardi 17 Septembre 2024

La petite ville de Fnideq, située à la frontière de Sebta, a une nouvelle fois été le théâtre de violents affrontements ce dimanche. Pour la deuxième nuit consécutive, des centaines de jeunes, principalement des mineurs, ont tenté de franchir la frontière en direction de l'enclave espagnole.



La situation a rapidement dégénéré en émeutes, malgré le renforcement considérable des dispositifs sécuritaires par les autorités marocaines. Bilan : plusieurs blessés graves de part et d'autre et un climat social tendu, soulevant de nombreuses interrogations, notamment sur les responsabilités et les causes profondes de ces événements tragiques.

Des appels anonymes accompagnés d'une violence organisée

Ces incidents ne sont pas dus au hasard. Derrière les tentatives de franchissement massif, une campagne subtile mais efficace se déroule sur les réseaux sociaux. Facebook, TikTok et d'autres plateformes diffusent des appels anonymes incitant les jeunes à envahir la frontière de Sebta.

Ces appels, souvent difficiles à réguler, mettent en lumière le rôle central des réseaux sociaux dans l'organisation de mouvements de masse échappant à la surveillance des autorités.

Cette situation rappelle les mobilisations en ligne, comme le boycott économique de 2018, posant la question essentielle : comment répondre à cette nouvelle forme de mobilisation numérique tout en préservant les libertés individuelles ?

La vulnérabilité des jeunes : quel rôle jouent les parents et l'école ?

Ce qui choque dans ces événements, c'est l'âge des personnes impliquées. La majorité des jeunes concernés n'ont pas plus de 15 ans. Ils viennent non seulement de Fnideq, mais aussi de différentes régions du Maroc et même d'Afrique subsaharienne, poussés par le rêve d'atteindre l'Europe.

Ce phénomène révèle un double échec : celui des familles, souvent démunies face à la précarité, et celui du système éducatif, totalement absent de cette réalité. De nombreux jeunes, déscolarisés ou en quête de repères, se retrouvent vulnérables aux influences néfastes sur les réseaux sociaux, en l'absence d'un encadrement adéquat.

Une réaction tardive des autorités : où était la communication ?

Alors que les tensions sur les réseaux sociaux augmentaient, les autorités marocaines n'ont émis aucune communication officielle. Ce silence est d'autant plus étonnant que les appels anonymes à l'immigration clandestine se multipliaient. Pourquoi n'y a-t-il pas eu de déclaration publique pour apaiser les esprits ou expliquer les risques encourus ? Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas anticipé ces violences en renforçant sa présence médiatique ou en établissant une cellule de crise pour gérer la situation ? Le mutisme des autorités face à cette crise a créé un vide, dans lequel la violence a pu s'engouffrer.

Les autorités craignaient-elles de légitimer ces appels en les mentionnant, ou s'agit-il simplement d'une incapacité à gérer une telle crise ? Autant de questions qui demeurent sans réponse face au silence persistant du gouvernement.

Que faire face à cette spirale ?

Face à cette spirale de violence, une approche exclusivement sécuritaire serait insuffisante. La régulation des contenus sur les réseaux sociaux et la traque des responsables de ces appels anonymes doivent devenir des priorités.

Cependant, au-delà de l'aspect numérique, il est crucial de réhabiliter l'éducation et la prévention au sein des familles. La communication des autorités doit aussi évoluer pour anticiper les crises, plutôt que d'intervenir une fois le chaos installé. L'avenir de Fnideq, et plus largement de la frontière maroco-espagnole, dépendra de la capacité des différents acteurs à agir de manière coordonnée et proactive afin d'éviter la répétition de tels événements.

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Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC En savoir plus sur cet auteur
Mardi 17 Septembre 2024
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