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Par Aziz Boucetta
Le wali de Bank al-Maghrib l’a dit, puis redit, au point que cette question est devenue un leitmotiv dans sa bouche. Depuis plusieurs mois, l’aussi inégalable qu’infatigable Abdellatif Jouahri tire la sonnette d’alarme quant aux restrictions de plus en plus sévères sur les transferts de fonds d’Europe vers le Maroc.
Lors d’une récente réunion panafricaine de gouverneurs de banques centrales et de diplomates, il a prévenu que « plusieurs autorités bancaires de pays de l’Union ont décidé de suspendre l’activité d’intermédiation opérée par les filiales bancaires situées en Europe auprès de la diaspora et pour le compte de leurs maisons mères marocaines », alertant sur « [l’imminente] interdiction pour les banques étrangères non établies dans l’UE d’offrir des services bancaires du pays d’origine directement à leurs clients résidant dans un pays de l’Union », et appelant solennellement à « une action diplomatique d’envergure de nos pays » africains.
M. Jouahri est connu pour ne pas avoir la langue dans sa poche, mais il sait ce qu’il dit et il le pèse. Les recettes en provenance des Marocains représentent 8% du PIB (comme en Egypte), et financent plus du tiers du déficit commercial. L’enjeu est immense, et l’action projetée par les 27 est vicieuse, elle frappera le Maroc à la poche.
Mais les 27, comme toujours, ont un leader, et selon un article paru dans Médias24, citant « une source bancaire de premier plan», il s’agit de la France, de la Belgique et des Pays-Bas, insistant sur « les banques françaises qui se montrent particulièrement virulentes». Précisons que 30% des 100 milliards de dirhams des MRE proviennent de France, un peu moins que 3 milliards d’euros annuellement.
La directive européenne, en apparence, ne concerne pas directement les transferts d’argent, mais les activités d’intermédiation des banques étrangères installées sur leur territoire ; or, à y regarder de plus près, on relève plusieurs mesures, discrètes, éparses, mais qui dans l’ensemble impactent ou impacteront considérablement les transferts d’argent vers, entre autres, le Maroc.
On retrouve encore...une fois la France, et en parlant de France, on revient sur ces propositions, mort-nées, de certains candidats à l’élection présidentielle française, qui avaient agité la menace du blocage de transferts d’argent de résidents en France vers leurs pays d’origine. On revient à une forme de « mesures vexatoires » évoquées par la source bancaire de notre confrère.
Mais d’autres pays de l’UE, qui abritent de fortes communautés africaines, ont également pris des mesures de restrictions significatives, comme l’Espagne qui impose un maximum de 3.000 euros par virement et par trimestre, ou encore l’Italie qui applique des taxes spécifiques et considérables pour chaque transfert. Tout cela se fait sous couvert de lutte contre le blanchiment d’argent, mais les raisons semblent ailleurs, dans la volonté de capter ou conserver une partie de l’argent envoyé dans les pays d’origine (glissons sur les transferts de bénéfices de sociétés étrangères dans ces pays d'Afrique, des transferts en centaines de millions d'euros).
Lors d’une récente réunion panafricaine de gouverneurs de banques centrales et de diplomates, il a prévenu que « plusieurs autorités bancaires de pays de l’Union ont décidé de suspendre l’activité d’intermédiation opérée par les filiales bancaires situées en Europe auprès de la diaspora et pour le compte de leurs maisons mères marocaines », alertant sur « [l’imminente] interdiction pour les banques étrangères non établies dans l’UE d’offrir des services bancaires du pays d’origine directement à leurs clients résidant dans un pays de l’Union », et appelant solennellement à « une action diplomatique d’envergure de nos pays » africains.
M. Jouahri est connu pour ne pas avoir la langue dans sa poche, mais il sait ce qu’il dit et il le pèse. Les recettes en provenance des Marocains représentent 8% du PIB (comme en Egypte), et financent plus du tiers du déficit commercial. L’enjeu est immense, et l’action projetée par les 27 est vicieuse, elle frappera le Maroc à la poche.
Mais les 27, comme toujours, ont un leader, et selon un article paru dans Médias24, citant « une source bancaire de premier plan», il s’agit de la France, de la Belgique et des Pays-Bas, insistant sur « les banques françaises qui se montrent particulièrement virulentes». Précisons que 30% des 100 milliards de dirhams des MRE proviennent de France, un peu moins que 3 milliards d’euros annuellement.
La directive européenne, en apparence, ne concerne pas directement les transferts d’argent, mais les activités d’intermédiation des banques étrangères installées sur leur territoire ; or, à y regarder de plus près, on relève plusieurs mesures, discrètes, éparses, mais qui dans l’ensemble impactent ou impacteront considérablement les transferts d’argent vers, entre autres, le Maroc.
On retrouve encore...une fois la France, et en parlant de France, on revient sur ces propositions, mort-nées, de certains candidats à l’élection présidentielle française, qui avaient agité la menace du blocage de transferts d’argent de résidents en France vers leurs pays d’origine. On revient à une forme de « mesures vexatoires » évoquées par la source bancaire de notre confrère.
Mais d’autres pays de l’UE, qui abritent de fortes communautés africaines, ont également pris des mesures de restrictions significatives, comme l’Espagne qui impose un maximum de 3.000 euros par virement et par trimestre, ou encore l’Italie qui applique des taxes spécifiques et considérables pour chaque transfert. Tout cela se fait sous couvert de lutte contre le blanchiment d’argent, mais les raisons semblent ailleurs, dans la volonté de capter ou conserver une partie de l’argent envoyé dans les pays d’origine (glissons sur les transferts de bénéfices de sociétés étrangères dans ces pays d'Afrique, des transferts en centaines de millions d'euros).
La France, à elle seule, assure environ près de 5 milliards d’euros de transferts de fonds, ou remises migratoires en langage savant, vers l’Afrique, dont plus de la moitié vers le Maroc.
On comprend dès lors cette volonté de limiter, réduire, ces transferts par la multiplication des exigences administratives et réglementaires, sous couvert tantôt de la lutte contre le blanchiment, tantôt de directive européenne née supposément à la suite du Brexit, quand ce n’est pas en respect des dispositions des lois anti-migratoires… Mais dans un cas comme dans l’autre, on constate qu’il y a des questions d’argent, de beaucoup d‘argent.
Les experts européens qui interviennent autour de ces questions disent et défendent l’idée que ce n’est pas vraiment significatif au vu des PIB et des masses de transferts au sein de l’UE, mais beaucoup de peu significatif finit par aboutir à du significatif, surtout dans une conjoncture économique et géopolitique incertaine.
Lorsque le roi du Maroc consacre une partie d’un de ses récents discours aux problèmes « administratifs » rencontrés par les Marocains du monde dans la concrétisation de leurs projets, il faut lire entre les lignes. Et quand le wali de la banque centrale du Maroc appelle à une « une action diplomatique d’envergure de nos pays (…) pour alerter sur ces développements préoccupants », il faut l’écouter et agir en conséquence, avant qu’il ne soit trop tard.
Aujourd’hui, entre le Nord et le Sud Global, la compétition est tout aussi globale ; le Nord se permet tous les coups et le Sud ne peut se permettre de les ignorer.
On comprend dès lors cette volonté de limiter, réduire, ces transferts par la multiplication des exigences administratives et réglementaires, sous couvert tantôt de la lutte contre le blanchiment, tantôt de directive européenne née supposément à la suite du Brexit, quand ce n’est pas en respect des dispositions des lois anti-migratoires… Mais dans un cas comme dans l’autre, on constate qu’il y a des questions d’argent, de beaucoup d‘argent.
Les experts européens qui interviennent autour de ces questions disent et défendent l’idée que ce n’est pas vraiment significatif au vu des PIB et des masses de transferts au sein de l’UE, mais beaucoup de peu significatif finit par aboutir à du significatif, surtout dans une conjoncture économique et géopolitique incertaine.
Lorsque le roi du Maroc consacre une partie d’un de ses récents discours aux problèmes « administratifs » rencontrés par les Marocains du monde dans la concrétisation de leurs projets, il faut lire entre les lignes. Et quand le wali de la banque centrale du Maroc appelle à une « une action diplomatique d’envergure de nos pays (…) pour alerter sur ces développements préoccupants », il faut l’écouter et agir en conséquence, avant qu’il ne soit trop tard.
Aujourd’hui, entre le Nord et le Sud Global, la compétition est tout aussi globale ; le Nord se permet tous les coups et le Sud ne peut se permettre de les ignorer.
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost