80% de couverture sociale pour les enfants au Maroc : un chiffre, mais quelle réalité ?
L’enfance, cet âge où tout se joue, est au cœur des préoccupations des politiques publiques marocaines. Dans son dernier rapport, l’Unicef dresse un bilan flatteur : 80% des enfants au Maroc bénéficient aujourd’hui d’une couverture sociale. Ce chiffre, bien qu’impressionnant, mérite une analyse plus approfondie pour comprendre ce qu’il traduit réellement sur le terrain.
Le Maroc, engagé depuis plusieurs années dans une réforme globale de son système de protection sociale, a fait de l’enfance une priorité. Cette couverture sociale inclut l’accès aux soins médicaux, aux programmes de nutrition, ainsi qu’à l’éducation et à la protection contre les violences. Des avancées notables ont été enregistrées, notamment grâce à des initiatives telles que le Régime d’Assistance Médicale (RAMED) et la généralisation de l’assurance maladie obligatoire.
Cependant, il serait naïf de considérer ces chiffres comme le reflet d’une réalité uniforme. Les disparités régionales et socio-économiques restent criantes. Si les enfants des grandes métropoles bénéficient d’un accès relativement aisé aux services sociaux, ceux des zones rurales et marginalisées continuent de faire face à des obstacles majeurs. L’absence d’infrastructures, le manque de personnel qualifié, et la difficulté de sensibiliser les familles à l’importance de ces programmes sont autant de défis qui freinent la pleine réalisation des objectifs.
En matière de santé, bien que la couverture sociale ait permis une réduction significative de la mortalité infantile, des lacunes subsistent dans la qualité des soins. Les hôpitaux publics, souvent surchargés, peinent à répondre aux besoins croissants. Par ailleurs, la nutrition reste un problème majeur, avec des taux inquiétants de malnutrition chronique dans certaines régions.
L’éducation, autre pilier fondamental de la couverture sociale, connaît elle aussi des progrès, mais reste marquée par des inégalités. Si le taux de scolarisation a augmenté, la qualité de l’enseignement et la lutte contre l’abandon scolaire demeurent des chantiers ouverts. L’inclusion des enfants en situation de handicap dans le système éducatif est également un défi qui nécessite une attention particulière.
Enfin, la protection contre les violences, qu’elles soient physiques, psychologiques ou économiques, est un domaine où beaucoup reste à faire. Les mécanismes de signalement et de prise en charge des enfants victimes de maltraitance sont encore insuffisants. De même, la problématique du travail des enfants, bien que en régression, reste une réalité dans certaines régions.
L’Unicef, dans son rapport, souligne également l’importance de la sensibilisation et de l’éducation des familles. Car une couverture sociale, pour être efficace, doit être accompagnée d’un changement de mentalité et d’une prise de conscience collective. Les parents doivent être informés des droits de leurs enfants et encouragés à les réclamer.
In fine, si le chiffre de 80% de couverture sociale est un motif de satisfaction, il ne doit pas masquer les défis structurels qui persistent. Le Maroc a pris des mesures importantes pour protéger son enfance, mais la route vers une couverture sociale universelle et équitable est encore longue. Il appartient désormais aux décideurs de transformer ces avancées en une réalité palpable pour chaque enfant, quel que soit son lieu de naissance ou son statut social.