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Par Aziz Boucetta
L’idée est originale, mais infaisable car cette conférence de Paris serait, 120 ans après, un remake de la Conférence d’Algésiras, celle du dépeçage du Maroc.
Ce qu’il y a d’intéressant au premier abord, ce sont deux éléments clairement énoncés pour la première fois : que la France endosse une responsabilité historique dans ce conflit, et que ce dernier oppose le Maroc et l’Algérie. Exit l’idée d’un peuple sahraoui, ou d’un problème de décolonisation, même si le terme est employé une fois dans le texte. Mais les auteurs prônent un règlement arabe, africain et européen, excluant de facto les Nations Unies qui sont saisies de ce dossier depuis un demi-siècle ; or l’UE est trop impliquée, la ligue arabe n’est pas concernée et l’UA peu fiable.
Le Maroc, principale partie concernée, s’en est remis à l’ONU, des résolutions ont été votées, et l’approche diplomatique ne doit pas sortir de ce cadre onusien.
La seconde idée intéressante est que les Européens commencent à prendre conscience que la question du Sahara « s’impose » à l’Europe, et que le Vieux Continent, confronté à de nombreux problèmes, aurait tout intérêt à trouver une solution à ce conflit qui le concerne tant pour l’énergie algérienne que pour la sérénité et, si possible, la prospérité sur son flanc sud. Une prise de conscience européenne est nécessaire, eu égard à la proximité géographique et à l’influence française sur l’Algérie militaire.
Face à la proposition du collectif, d’autres remarques doivent être faites :
1/ Logique vainqueur/vaincu. L’Algérie veut s’imposer au Maroc et lui imposer une solution, et si cette conférence se tient, c’est dans l’objectif de trouver une solution consensuelle. Toutefois, comme la Catalogne pour l’Espagne, les îles Falkland pour le Royaume-Uni, la Corse pour la France ou encore le Tibet pour la Chine, le Sahara n’est ni négociable pour le Maroc ni pouvant faire l’objet d’un quelconque consensus. Et ce n’est pas parce qu’il est moins puissant que les pays cités que le Maroc devrait être traité autrement, auquel cas on reviendrait à la logique vainqueur/vaincu que les auteurs disent vouloir dépasser.
2/ Démocratisation de l’Algérie. Ce dont la région a vraiment besoin, c’est que les militaires algériens partent et cèdent leur place à un pouvoir civil. C’est aussi simple que cela. Ils maintiennent le pays sous cloche, répriment toute volonté d’action et musellent toute velléité de réflexion. Ils entretiennent cette rente mémorielle dont...a parlé Emmanuel Macron dans un rare moment de sincérité et de lucidité. La politique des dirigeants algériens est entièrement tributaire de la haine qu’ils vouent au Maroc, lequel ne cesse de leur tendre la main, tout en gardant une arme dans l’autre, car on ne sait jamais.
L’Algérie, et avec elle le Maghreb, ont raté la phase Boudiaf puis l’intermède du hirak ; il faudra attendre une troisième occasion pour voir peut-être l’instauration d’un Etat civil en Algérie, ainsi que le demandent les Algériens eux-mêmes.
Ce qu’il y a d’intéressant au premier abord, ce sont deux éléments clairement énoncés pour la première fois : que la France endosse une responsabilité historique dans ce conflit, et que ce dernier oppose le Maroc et l’Algérie. Exit l’idée d’un peuple sahraoui, ou d’un problème de décolonisation, même si le terme est employé une fois dans le texte. Mais les auteurs prônent un règlement arabe, africain et européen, excluant de facto les Nations Unies qui sont saisies de ce dossier depuis un demi-siècle ; or l’UE est trop impliquée, la ligue arabe n’est pas concernée et l’UA peu fiable.
Le Maroc, principale partie concernée, s’en est remis à l’ONU, des résolutions ont été votées, et l’approche diplomatique ne doit pas sortir de ce cadre onusien.
La seconde idée intéressante est que les Européens commencent à prendre conscience que la question du Sahara « s’impose » à l’Europe, et que le Vieux Continent, confronté à de nombreux problèmes, aurait tout intérêt à trouver une solution à ce conflit qui le concerne tant pour l’énergie algérienne que pour la sérénité et, si possible, la prospérité sur son flanc sud. Une prise de conscience européenne est nécessaire, eu égard à la proximité géographique et à l’influence française sur l’Algérie militaire.
Face à la proposition du collectif, d’autres remarques doivent être faites :
1/ Logique vainqueur/vaincu. L’Algérie veut s’imposer au Maroc et lui imposer une solution, et si cette conférence se tient, c’est dans l’objectif de trouver une solution consensuelle. Toutefois, comme la Catalogne pour l’Espagne, les îles Falkland pour le Royaume-Uni, la Corse pour la France ou encore le Tibet pour la Chine, le Sahara n’est ni négociable pour le Maroc ni pouvant faire l’objet d’un quelconque consensus. Et ce n’est pas parce qu’il est moins puissant que les pays cités que le Maroc devrait être traité autrement, auquel cas on reviendrait à la logique vainqueur/vaincu que les auteurs disent vouloir dépasser.
2/ Démocratisation de l’Algérie. Ce dont la région a vraiment besoin, c’est que les militaires algériens partent et cèdent leur place à un pouvoir civil. C’est aussi simple que cela. Ils maintiennent le pays sous cloche, répriment toute volonté d’action et musellent toute velléité de réflexion. Ils entretiennent cette rente mémorielle dont...a parlé Emmanuel Macron dans un rare moment de sincérité et de lucidité. La politique des dirigeants algériens est entièrement tributaire de la haine qu’ils vouent au Maroc, lequel ne cesse de leur tendre la main, tout en gardant une arme dans l’autre, car on ne sait jamais.
L’Algérie, et avec elle le Maghreb, ont raté la phase Boudiaf puis l’intermède du hirak ; il faudra attendre une troisième occasion pour voir peut-être l’instauration d’un Etat civil en Algérie, ainsi que le demandent les Algériens eux-mêmes.
3/ Le Sahara, pour les Marocains. Au Maroc, le Sahara n’est pas une question de pouvoir politique ou de « survie de la monarchie », comme il se dit souvent en Europe. L’intégrité territoriale du royaume est l’affaire de tous les Marocains ; la question n’est pas négociable. Pour l’Algérie, le Sahara demeure avant tout une affaire de politique extérieure pour masquer les manquements de la politique intérieure.
Les faiseurs du droit international et les sachants de la géopolitique mondiale le savent parfaitement et c’est pour cette raison qu’ils ne brusquent pas le royaume. Le Maroc est avec son Sahara ou ne sera pas, et s’il n’est pas, l’Europe s’effondrera par manque de sécurité.
4/ Une conférence à Paris, qui deviendrait LA Conférence de Paris, est chose impossible, car la France ne peut être la solution puisqu’elle est le problème. La colonisation, c’est elle, la décolonisation c’est encore elle, et l’actuelle crispation, c’est toujours elle.
L’idée est donc originale, mais elle est illégale sur le plan du droit international incarné par le Conseil de sécurité des Nations unies et matérialisé par les dizaines de résolutions de ce conseil. Elle est, en outre, irréalisable car ne tenant pas compte des paramètres du Maroc et de la sensibilité des Marocains.
Elle est enfin, et surtout, aussi insidieuse que dangereuse car elle va en filigrane dans le sens d’Alger qui veut un consensus, donc des concessions du Maroc, et de la France qui, en totale perdition diplomatique, chercherait à se remettre en selle en se présentant comme faiseuse de paix, au moyen d’une grande « conférence internationale » sur son sol.
Pour les auteurs de la tribune du ci-devant « journal de référence » le Monde, parmi lesquels on retrouve plusieurs noms qui soutiennent la thèse algérienne ( ce qui est de leur droit), le raisonnement est une sorte de pont-aux-ânes, tant ils semblent ignorer, ou vouloir ignorer les réalités post-coloniales et le contexte politique algérien.
En revanche, si « conférence internationale » il pourrait, et devrait, y avoir, c’est pour une relecture des critères et objectifs du processus de décolonisation française sur le continent ; pas d’excuses ou de repentance à demander, mais la vérité sur la période coloniale et sur les modes de décolonisation. Une telle conférence pourrait se tenir à Rabat…
Les faiseurs du droit international et les sachants de la géopolitique mondiale le savent parfaitement et c’est pour cette raison qu’ils ne brusquent pas le royaume. Le Maroc est avec son Sahara ou ne sera pas, et s’il n’est pas, l’Europe s’effondrera par manque de sécurité.
4/ Une conférence à Paris, qui deviendrait LA Conférence de Paris, est chose impossible, car la France ne peut être la solution puisqu’elle est le problème. La colonisation, c’est elle, la décolonisation c’est encore elle, et l’actuelle crispation, c’est toujours elle.
L’idée est donc originale, mais elle est illégale sur le plan du droit international incarné par le Conseil de sécurité des Nations unies et matérialisé par les dizaines de résolutions de ce conseil. Elle est, en outre, irréalisable car ne tenant pas compte des paramètres du Maroc et de la sensibilité des Marocains.
Elle est enfin, et surtout, aussi insidieuse que dangereuse car elle va en filigrane dans le sens d’Alger qui veut un consensus, donc des concessions du Maroc, et de la France qui, en totale perdition diplomatique, chercherait à se remettre en selle en se présentant comme faiseuse de paix, au moyen d’une grande « conférence internationale » sur son sol.
Pour les auteurs de la tribune du ci-devant « journal de référence » le Monde, parmi lesquels on retrouve plusieurs noms qui soutiennent la thèse algérienne ( ce qui est de leur droit), le raisonnement est une sorte de pont-aux-ânes, tant ils semblent ignorer, ou vouloir ignorer les réalités post-coloniales et le contexte politique algérien.
En revanche, si « conférence internationale » il pourrait, et devrait, y avoir, c’est pour une relecture des critères et objectifs du processus de décolonisation française sur le continent ; pas d’excuses ou de repentance à demander, mais la vérité sur la période coloniale et sur les modes de décolonisation. Une telle conférence pourrait se tenir à Rabat…
Rédigé par Aziz Boucetta sur Panorapost