Dans son communiqué, l’Association Tahadi pour l’Égalité et la Citoyenneté (ATEC) tire la sonnette d’alarme face à ce qu’elle qualifie de « recul alarmant », menaçant d’annuler des années de luttes féministes et de progrès constitutionnels, notamment en matière de lutte contre les violences basées sur le genre. Au cœur de cette inquiétude : l’article 1-41 du projet de loi n°03.23, qui prévoit un élargissement des recours à la conciliation pénale.
Selon ATEC, cette disposition risque de banaliser l’impunité des auteurs de violences faites aux femmes, y compris dans les cas les plus graves. L’article permettrait au parquet de valider une conciliation entre les parties sans passer par le président du tribunal ni s’assurer des conditions dans lesquelles l’accord a été conclu — une faille juridique préoccupante. Les victimes, déplore l’Association, pourraient ainsi être contraintes au désistement sous la pression, l’intimidation ou le chantage, sans qu’aucune vérification de leur consentement libre et éclairé ne soit exigée.
Plus inquiétant encore, cet article engloberait des infractions pourtant sévèrement punies par la loi 103.13 et le Code pénal, comme les coups et blessures volontaires (articles 401 et 404), les atteintes à la vie privée via les technologies de l’information (articles 1-447 à 3-447), ainsi que les cas de récidive ou de violences exercées par un proche ou une personne en position d’autorité.
Pour l’ATEC, l’adoption de cet article reviendrait à institutionnaliser l’impunité et à vider de son contenu la loi 103.13. Elle souligne par ailleurs l’incohérence d’une telle mesure avec les engagements internationaux du Maroc, notamment les recommandations des Nations Unies en matière de législation contre les violences faites aux femmes, et avec la Déclaration de Marrakech de 2020.
L’organisation rappelle également que ce projet de réforme va à l’encontre de la Stratégie gouvernementale pour l’égalité 2023-2026, qui vise un environnement sans violences envers les femmes, et des principes du Nouveau Modèle de Développement prônant une tolérance zéro face aux violences sexistes.
Face à cette menace, ATEC appelle les parlementaires à amender d’urgence l’article 1-41, en excluant de son champ toutes les infractions portant atteinte aux droits des femmes. Elle exhorte également le gouvernement à honorer ses engagements et à garantir aux femmes un véritable accès à la justice, à la protection et à la dignité.
« Ce qui se joue ici dépasse le simple cadre législatif : c’est l’avenir d’une politique pénale équitable et protectrice, fondée sur les droits humains et la lutte contre les discriminations systémiques », conclut le communiqué.