Par Mustapha Sehimi
Aux États-Unis, Houston (Texas) a été frappée par l'ouragan Béryl couplé avec des vagues de chaleur de 40° C; le 7 juillet quelque 70 millions d'Américains subissaient une canicule avec une pointe de 53° C dans le parc national de la Vallée de la mort (Californie); Las Vegas (Arizona) a battu un record avec 48° C.
Dans le monde, les calamités s'enchaînent. Au Canada, plus de 400 incendies pratiquement sans contrôle; en Russie, un million d'hectares de forêts ont brûlé en Sibérie et dans l’extrême-Orient; sans oublier une nouvelle canicule en Europe centrale et méridionale de l'ordre de 40° C, en Roumanie, en Croatie, en Albanie, en Grèce ou encore en Italie ; enfin, la mousson et ses pluies torrentielles touchant plus de trois millions de personnes au Bangladesh et en Inde.
Dévastation
Un "nouvel âge" donc : le sceau de la dévastation. Ainsi, le mois de juin a été le plus chaud relevé à l'échelle mondiale. C'est le treizième mois consécutif dépassant de 1,5° C les moyennes de l'ère préindustrielle, l'objectif retenu par l'accord de Paris (COP 21) de novembre 2015.
Ces derniers mois, le cortège des catastrophes s'est développé: 1.300 morts lors du pèlerinage à La Mecque avec une température qui a même atteint 51,8 C°; Pékin et le nord de la Chine avec plus de 40 C°; la France, le Kenya, l'Afghanistan, le Brésil ont aussi souffert de la chaleur etc. C'est le changement climatique qui est le moteur de la chaleur et des phénomènes extrêmes actuels.
Le réchauffement est lié à la hausse croissante des émissions de gaz à effet de serre générées par la combustion d'énergies fossiles (gaz, charbon, pétrole) ainsi qu'à la déforestation; il augmente l'intensité, la durée et la fréquence des vagues de chaleur, des sécheresses, des pluies diluviennes et des incendies la "totale"...
Voilà bien une tendance de long terme à laquelle s'ajoute le phénomène naturel El Nino dont l'impact se fait sur les températures mondiales et fait redouter certains phénomènes météorologiques majeurs. Il faut s'attendre à ce que le monde connaisse chaque année davantage d'évènements extrêmes.
Les experts avancent que cette "surchauffe" pourrait être limitée avec l'épisode La Nina, au second trimestre de 2024, abaissant légèrement le thermomètre mondial. Pour autant, cela va-t-il modifier le changement climatique ? Une réponse réservée est donnée à cet égard car des impacts vont probablement continuer à s'accentuer. Et l'année 2024 va certainement être la plus chaude jamais enregistrée, devant 2023.
Un nouveau régime climatique ? Certains évènements le préfigurent, telles 1'exceptionnelle fonte de la banquise antarctique ou encore l'extrême chaleur de l'Atlantique. Une rupture avec un territoire désormais inconnu avec un monde où il n'a jamais fait aussi chaud en plus de cent mille ans...
Du côté du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), l'approche qui prévaut de plus en plus est celle-ci : "Il faut faire notre deuil du climat du passé". Elle retient le fait que tout cela survient alors que l'on est globalement sorti de la phase d'El Nino marquée par un réchauffement du Pacifique équatorial tirant les températures mondiales à la hausse.
Et elle met en cause l'impact du réchauffement climatique lié aux activités humaines. Si l'on ne réduit pas les émissions de gaz à effet de serre, la situation ne pourra qu'empirer avec notamment des vagues de chaleur de trois fois tous les dix ans au lieu d'une fois par décennie.
De plus, le risque est grand de franchir à terme des points de bascule régionaux. Référence est faite à des changements abrupts : disparition des calottes glaciaires du Groenland et de l'Antarctique occidental, le dégel du pergélisol -les sols gelés en permanence- 1'extinction des coraux et le sinistre de la forêt amazonienne.
A long terme, certaines petites îles seront rayées de la carte (Maldives, Kiribati, Tuvalu, les îles Marshall, une partie des Seychelles, les îles Salomon et bien d’autres). Au rythme actuel, d'autres phénomènes sont à relever avec des risques en cascade : diminution de la production agricole globale, pénuries alimentaires à l'échelle mondiale, hausse des prix...
Au total, ce constat préoccupant : le changement climatique n'est pas nié par la majorité de la population mais ses impacts sont sous-estimés. Une forme de banalisation s'est installée ; elle est faite de lassitude quand les évènements extrêmes frappent les autres. Tout le monde en convient : "C'était mieux avant...". Mais cela ne pousse pas à ouvrir les yeux sur les grands risques. Aujourd'hui. Et demain.
Rédigé par Mustapha Sehimi sur Quid